Une histoire de famille gravée dans la roche
Ce projet est né d’un héritage, d’une mémoire partagée entre générations, mais aussi d’un amour commun pour les récits vrais — ceux qui sculptent le destin. En collaboration étroite avec mon père, qui a repris du livre et documenté l’ensemble de la narration, nous avons retracé l’incroyable aventure de mon oncle Marcel lors de la première traversée hivernale du Mont Blanc en 1938, aux célèbres Aiguilles du Diable. Ensemble, nous avons donné vie à ce récit sous la forme d’une bande dessinée, mêlant rigueur historique et émotion personnelle, pour que cette épopée humaine ne s’efface jamais des cimes comme des mémoires.
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Bande dessinée | Récit | Histoire vraie
La traversée des Aiguilles du diable —
AIGUILLES DU DIABLE 1938
UNE HISTOIRE VRAIE
SCENARIO ALAIN GALLAY
GENEVE 2014
Ce livre relate l’histoire vraie de la première traversée hivernale des Aiguilles du Diable dans le massif du Mont Blanc. Après avoir réussi en 1937 la première ascension hivernale de la Dent du Caïman dans le même Massif, le guide Raymond Lambert et mon oncle Marcel Gallay décident de s’attaquer aux Aiguilles du Diable. Mlle Erika Stagni, une alpiniste chevronnée, les accompagne en tant que cliente du guide. Ils s’engagent le 7 février 1938 dans leur projet longuement muri, à la suite d’une longue série de jours de beau temps. Malheureusement une tempête d’une rare violence les surprend en pleine traversée alors que, dans la nuit du 9 au 10, ils bivouaquent au sommet de la Pointe Médiane. Après avoir achevé leur traversée dans des conditions épouvantables et perdu la plus grande partie de leurs provisions, la cordée, égarée au sommet du Tacul, ne retrouve pas la voie de descente qui aurait pu les mener au col du Midi et doit se réfugier dans une crevasse que l’on peut situer à proximité du col Maudit. Le beau temps revenu le 13, Raymond Lambert réussi à descendre seul les pentes du Mont Blanc du Tacul et opère la jonction avec les équipe de secours venues de Genève et de Chamonix. Les opérations de sauvetage auront lieu sous un soleil radieux, mais dans un froid sibérien.
- Dans La tragédie des Aiguilles du diable (Genève, Franck Luthi 1952) Marcel Gallay relate dans les moindres détails son aventure dont la trame a été ici scrupuleusement respectée. Il n’était pas nécessaire de modifier quoi que ce soit à cette narration pour obtenir un bon
scénario.- Dans le chapitre L’hôtel de la mort lente de son livre A l’assaut des quatre mille (Genève, Editions de la Frégate 1946) Raymond Lambert relate plus brièvement cette première. Les deux récits ne présentent pas de contradictions majeures et se recoupent remarquablement. Celui de Lambert apporte néanmoins quelques détails supplémentaires bienvenus sur sa descente solitaire du Mont-Blanc du Tacul.
- Marcel Gallay avait réalisé une série de gouaches inédites consacrées à sa traversée des Aiguilles du Diable (86 vues), et à ses ascensions de la Dent du Caïman (2 vues) et des Grands Charmoz (4 vues). Ces illustrations fournissent de nombreux détails permettant de préciser certains épisodes et constituent même une ébauche de bande dessinée mettant en scène les divers acteurs du drame. Sa documentation recèle également quelques croquis d’itinéraires et des photographies originales du sauvetage prises notamment au col du Midi et dans les séracs du Géant.
- De nombreux livres de montagne fournissent des vues d’alpinistes en action, tant lors de l’escalade que lors des rappels, autant de sources pour mettre en scène certaines postures en tenant compte d’un équipement qui n’avait pas la sophistication de celui d’aujourd’hui. Il y a plus de 70 ans, on ne skiait pas comme aujourd’hui et les difficultés de la montagne commandaient la plus grande prudence dans les postures.
- Enfin je tenais à ce que l’histoire se déroule dans un environnement géographique et topographique le plus vraisemblable possible afin que les alpinistes familiers de la région puissent s’y reconnaître. Les cartes topographiques, de vieilles cartes postales et les multiples photographies disponibles sur internet fournissent ici une documentation surabondante permettant de restituer le cadre topographique, à l’exception peut-être pour certains plans rapprochés situés dans les Aiguilles. Il convient également d’avoir des notions de morphologie glaciaire et de savoir ce qu’est un glacier, une rimaye ou une chute de séracs. Je ne connais la région que pour n’avoir descendu qu’une fois la Vallée Blanche à ski. Il y avait là un véritable défi pour le géographe et le géomorphologue.
Le puzzle ainsi assemblé donne au récit sa véritable dimension.
J’ai tenu à mentionner sous leurs vrais noms les acteurs du sauvetage, guides de Chamonix et alpinistes de Genève, dont mon père. Plusieurs d’entre eux sont connus des milieux montagnards, du moins de ma génération, et j’entendais souvent parler de certains d’entre eux. Cela est pour moi une façon de rendre hommage à leur courage et à leur dévouement. Plusieurs ne sont pas revenus indemnes, physiquement et moralement, de cette aventure. Qu’ils soient ici remerciés pour leur action. Je ne sais si une telle solidarité pourrait être encore possible aujourd’hui à l’heure des téléphones portables, des hélicoptères et des secouristes professionnels. En 1938, on était dans un autre monde. La proximité de Chamonix
ne limitait en rien le caractère de bout du monde du massif du Mont Blanc. Tout travail d’historien se heurte aux lacunes de l’information et aux biais introduits par la documentation dont ce dernier dispose. Les acteurs même des évènements proposent souvent des vues approximatives des scénarios dont ils sont partie prenante. La Vérité de l’Histoire nous restera à jamais inaccessible. Que Clio me pardonne si j’ai commis quelques erreurs involontaires dans la restitution de cette histoire.Alain Gallay
Bréonaz, Alpes valaisannes,
Août 2014Détails
Illustration & Composition
Chaque planche a été pensée comme une séquence cinématographique. Le trait est expressif, parfois rugueux comme la montagne elle-même, et les contrastes marquent la rudesse de l’hiver alpin. Les illustrations ont été réalisées dans un style à la fois narratif et immersif, afin de transmettre au lecteur l’intensité physique et mentale de l’ascension. L’objectif : faire ressentir le souffle coupé, le froid mordant, et la beauté brute des cimes.
Récit & Recherche Historique
Le récit s’appuie sur des recherches méticuleuses menées ensembe par mon père et moi-même, nourries d’archives familiales, de carnets d’alpinisme et de photographies anciennes. Chaque dialogue, chaque séquence est ancrée dans des faits réels, retravaillés avec justesse pour une lecture fluide et captivante. Cette bande dessinée rend hommage à l’exploit de Marcel Gallay, tout en questionnant ce que signifie repousser ses limites — dans l’histoire, comme dans la mémoire familiale.